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Protection de l’environnement : les raisons de la non réhabilitation des sites miniers (3/3)

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La réhabilitation des sites miniers industrielles au Burkina Faso n’est pas effective. Cette non réhabilitation des sites miniers en fin d’exploitation peut en partie s’expliquer par le manque de moyens financiers pour la prise en charge des frais des sessions de comités mis en place, selon Yomboé Juste Bationo, Inspecteur de l’environnement. Il préconise la révision des textes pour corriger cette insuffisance dans la troisième partie de l’interview accordée à Mines Actu Burkina.

Mines Actu Burkina : Parlons de la réhabilitation des sites miniers, à ce jour où en est-on avec le processus ?

Yomboé Juste Bationo : La réhabilitation des sites miniers est un processus qui se définit comme étant l’ensemble d’opérations (réaménagement, traitement de dépollution, confinement, résorption des déchets, contrôles institutionnels…) effectué en vue de rendre un site apte à un usage donné. On peut dire que le processus est effectif et suis son cours avec l’adoption du Décret n°2017- 0068/PRES/PM/MEMC/MEEVCC/MINEFID/MATDSI du 15 février 2017 portant organisation, fonctionnement et modalités de perception des ressources du Fonds de réhabilitation et de fermeture des mines (FRFM), de l’Arrêté interministériel n°2019-554/ MEEVCC/ MMC/ MINEFID/ MATDCS du 30 octobre 2019 portant création du Comité technique interministériel d’examen des plans et programmes de réhabilitation et de fermeture des mines et carrières (CT/EV), du Comité interministériel de suivi-contrôle des travaux de réhabilitation et de fermeture des mines et carrières (CT/SC) et fixation des conditions de validation, de décaissement, de contrôle des travaux de réhabilitation et détermination des travaux éligibles, de l’arrêté n°2020-392/MEEVCC/CAB du 2 juillet 2020 portant des membres du comité technique interministériel d’examen des plans et programmes de réhabilitation et de fermeture des mines et carrières, de l’ouverture de comptes dans les livres de la BCEAO par le Fonds d’intervention pour l’environnement (FIE) au profit des sociétés minières, du transfert des cotisations au FRFM des banques commerciales dans les comptes de la BCEAO ouverts à cet effet.

Pourquoi aucun site n‘est réhabilité ?

La réhabilitation est un long processus avec très souvent beaucoup d’exigences d’où la prudence et/ou la lenteur observées au niveau de l’administration. Elle nécessite une franche collaboration de tous les acteurs (administration publique, société civile, populations riveraines et autorités locales) pour faciliter le suivi et le contrôle environnementaux même après la fermeture. Mais à mon humble avis, la non réhabilitation des sites miniers en fin d’exploitation peut en partie s’expliquer par le manque de moyens financiers pour la prise en charge des frais de sessions du comité technique interministériel d’examen des plans et programmes de réhabilitation et de fermeture des mines et carrières (CT/EV). En effet, les dépenses relatives aux travaux de réhabilitation et de fermeture des sites miniers ne peuvent être autorisées qu’après la réalisation d’une évaluation précise du coût de la réhabilitation et de fermeture des sites miniers, la transmission du rapport d’évaluation du CT/EV faisant ressortir les conclusions des travaux, l’avis final, la liste des membres ayant participé aux travaux ainsi que la version définitive du plan de réhabilitation et de fermeture au Conseil d’Administration du Fonds d’Intervention pour l’environnement (FIE) et l’établissement d’un rapport d’exécution physique et financière des travaux de l’année précédente s’il y a lieu. Ce qui ne permet pas à l’administration de procéder au déblocage des fonds pour la tenue des sessions de validation des plans et programmes annuels de réhabilitation et de fermeture. A cela, s’ajoutent l’insuffisance de personnel qualifié et de ressources nécessaires à l’ANEVE, la DGPE et l’IGM pour s’occuper de la réhabilitation totale des mines industrielles en fin d’exploitation et le manque d’expérience et de formation requises en matière d’identification des impacts environnementaux liés à l’exploitation minière pour contribuer à bien estimer les coûts desdits plans de certains membres du Comité Technique sur les Évaluations Environnementales (COTEVE) conclue la Cours des Comptes du Burkina Faso (CC-BF) en 2021, dans son rapport sur l’audit de la performance de la surveillance et de la réhabilitation environnementales des sites miniers industriels au Burkina Faso de 2015 à 2019. Ce qui fait que les plans de réhabilitation et de fermeture des mines industrielles de Kalsaka et de Essakane, déposés respectivement en août 2015 et en novembre 2020 ne sont pas encore mis en œuvre malgré que KALSAKA MINING SA et IAMGOLD ESSAKANE SA sont à jour de leurs cotisations au FRFM. Si rien n‘est fait pour réviser nos textes réglementaires, les mines industrielles de Nétiana, Inata, Ouaré, Youga, Taparko, Karma et Trevali Perkoa en arrêt ou fermées serons dans cette situation sans aucune forme de réhabilitation ou de restauration. Il y a donc une réelle urgence à prendre les mesures nécessaires qui s’imposent car un site minier (artisanal ou industriel) en arrêt ou fermé constitue un réel danger pour l’environnement, aussi bien en termes de perte du couvert végétal, de perturbation des milieux écologiques et de sécurité publique.

Quels sont les meilleurs pratiques ou conseils dans le domaine que vous pouvez citer ?

Tous les titulaires de permis d’exploitation et les bénéficiaires d’autorisations d’exploitation industrielle de substances de carrières ont l’obligation de procéder à la réhabilitation totale de  leurs sites miniers à la fin de l’exploitation. Pour y arriver, les meilleures pratiques consistent à la réhabilitation progressive des zones perturbées par les sociétés minières conformément aux dispositions du Décret n°2017-0068 du 15 février 2017 portant organisation, fonctionnement et modalités de perception des ressources du FRFM. Ledit décret stipule que le titulaire et le bénéficiaire soumettent un programme annuel de réhabilitation assorti des coûts estimatifs à l’appréciation du comité technique interministériel d’examen des plans et programmes de réhabilitation et de fermeture des mines et carrières (CT/EV). Cependant, ce comité chargé également d’examiner les propositions de mise à jour des plans de réhabilitation et de dresser le rapport annuel sur la gestion du fonds et l’état de mise e œuvre des plans de réhabilitation n’est toujours pas encore opérationnel. Ce qui amène certaines compagnies minières à entreprendre des activités de réhabilitation sur la base de plans de réhabilitation et de fermeture non validés. Il en résulte donc une absence de suivi des travaux de réhabilitation progressive par l’État, ce qui peut entrainer un abandon de sites miniers après exploitation et/ou une mauvaise qualité desdits travaux.

Dans une perspective de révision des textes, quelles sont vos propositions pour améliorer ?

La proposition sera la révision de nos textes réglementaires notamment le Décret n°2017- 0068 du 15 février 2017 portant organisation, fonctionnement et modalités de perception des ressources du fonds de réhabilitation et de fermeture des sites minier et l’Arrêté interministériel n°2019-554 du 30 octobre 2019 portant création du CT/EV, du CT/SC et fixation des conditions de validation, de décaissement, de contrôle des travaux de réhabilitation et détermination des travaux éligibles. Aussi, à l’image du fonds minier de développement local (FMDL), le budget des structures étatiques doit être utilisé pour la prise en charge des frais de sessions du CT/EV et du CT/SC. Ce qui permettra d’utiliser rationnellement les ressources du FRFM à la mise en œuvre effective des plans de réhabilitation et de fermeture des mines.

Dernier mot

 Avec le contexte sécuritaire marqué par des attaques terroristes contre des sites miniers, il apparaît donc nécessaire de procéder à la réhabilitation totale des mines industrielles en arrêt et/ou fermées au Burkina Faso et cela passera nécessairement par la révision de la réglementation régissant le secteur minier. Aussi, l’État doit-il renforcer les capacités des membres du CT/EV et du CT/SC et utiliser rationnellement les ressources du FRFM.

Interview réalisée par Elie Kaboré

#Mines_Actu_Burkina

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