Cet article a été publié dans le numéro N°04-05 Déc.2022 – Janv. 202 de RSE Mine Magazine du Forum RSE. Dans sa chronique sur le développement durable, Kalid Kere, Président du Forum multipartite pour la Responsabilité sociale des entreprises (Forum RSE) nous livre son analyse sur la contribution du Canada dans la promotion du concept de Responsabilité sociale des entreprises (RSE) au pays des hommes intègres.
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Voici l’article:
Le Canada et la RSE au Burkina Faso
Le gouvernement canadien a lancé en avril 2022 une nouvelle stratégie RSE axée sur la notion de conduite responsable des entreprises (CRE). Cette stratégie vient renforcer le socle des initiatives qui ont fait la réputation du modèle d’affaires canadien à l’international. En effet les compagnies canadiennes sont souvent citées en exemples partout où elles opèrent. Elles sont généralement reconnues être de bons citoyens corporatifs qui appliquent les standards les plus élevés de leur secteur, en l’occurrence le secteur minier pour ce qui est du cas du Burkina Faso. Faisons un tour d’horizon des initiatives canadiennes en matière de promotion de la RSE au Burkina Faso.
Le Canada est assurément un précurseur de la Responsabilité sociale des entreprises (RSE) au Burkina Faso. Diverses initiatives ont été impulsées par le Canada par le biais de ses agences de coopération et par les entreprises minières qui appliquent des normes et standards de durabilité propres au modèle d’affaires canadien.
La mise en place d’un écosystème RSE au Burkina
La promotion de la RSE a toujours été une préoccupation constante du gouvernement du Canada. Dès 2012, à la faveur du boom minier au Burkina Faso et du débat naissant sur les problématiques de développement durable du secteur minier, l’ambassade du Canada a joué un rôle majeur dans la mise en place du Forum multipartite pour la responsabilité sociale des entreprises (Forum RSE). Inspiré d’un modèle canadien, le Devonshire Initiative, le Forum RSE est un cadre de dialogue entre sociétés minières et ONG sur les problématiques de développement durable du secteur minier. Parmi les membres fondateurs du Forum RSE, on pouvait compter les sociétés minières canadiennes comme IAMGOLD Essakane, SEMAFO et des ONG comme Plan Burkina, Save the Children, etc. L’Institut 2IE assurait le rôle de structure de facilitation. Dès son démarrage le Forum RSE a servi de base de capitalisation du programme Développer les Capacités des jeunes (DCAJ). Ce projet quinquennal (2011- 2016), d’un montant global de 7,5 millions de dollars canadiens (environ 3,5 milliards FCFA) financé par l’Agence canadienne de développement international (aujourd’hui Affaires Mondiale Canada) avec la collaboration de Plan Canada et IAMGOLD a permis la formation et l’insertion aux métiers de 8000 jeunes burkinabè issus des Centres d’Education de Base Non[1]formels (CEBNF) des régions du Centre[1]nord et du Sud-ouest du Burkina. Mamadou Ouattara, Délégué commercial à l’ambassade du Canada au Burkina Faso nous relate quelques faits saillants qui ont suivi ces étapes initiales: « En 2017, nous avons accompagné la Chambre des mines du Burkina Faso dans l’organisation d’un atelier sur l’harmonisation de la compréhension du concept de RSE au Burkina Faso. Cet atelier, précédé d’une étude de référence, avait réuni toutes les parties prenantes du secteur minier afin qu’elles discutent et s’entendent sur les contours de la notion de RSE». Sans oublier rappelle-t-il « l’organisation en marge de la Semaine des activités minières d’Afrique de l’ouest (SAMAO) en septembre 2019, de deux ateliers respectivement sur les principes volontaires sur les droits de la personne (UN-VP) et sur le rôle et la place des femmes dans le secteur minier ouest[1]africains ». Toujours dans le cadre du renforcement de l’écosystème RSE au Burkina et plus récemment, en novembre 2022, le Service de Délégués Commerciaux a organisé en partenariat avec le Forum RSE un atelier d’information et de partage d’expérience sur la Conduite responsable des entreprises (CRE).
L’atelier a servi à la présentation de la nouvelle stratégie CRE aux parties prenantes du secteur minier en vue de donner la perspective canadienne de la conduite responsable des entreprises et de présenter les priorités du gouvernement canadien pour soutenir les entreprises canadiennes exerçant des activités à l’étranger.
La promotion de l’intégration des PMEs burkinabè dans la chaîne d’approvisionnement minière
L’ambassade du Canada a été un acteur majeur de la promotion de la fourniture locale des biens et services miniers au Burkina. Dans cette optique la Canada a soutenu la création de l’Alliance burkinabè de fournisseurs de biens et services miniers (ABSM) avec d’autres acteurs comme la Chambre des mines, la Chambre de commerce et d’industrie du Burkina Faso et IAMGOLD Essakane SA. A travers l’appui à la création de l’ABSM, l’ambassade a organisé régulièrement des missions commerciales de fournisseurs miniers burkinabè au Canada pour favoriser les contacts d’affaires entre fournisseurs miniers burkinabè et équipementiers et fournisseurs de services miniers canadiens. Ces contacts d’affaires ont été déterminants pour faciliter les transferts de connaissances et de savoir[1]faire mais aussi le partage d’expérience sur les standards de l’industrie minière. Le soutien à l’ABSM est demeuré constant au fil des années. Ainsi l’ABSM a bénéficié de l’accompagnement du Canada pour la mise en place d’une plateforme des fournisseurs miniers en 2018 sans oublier la mise en œuvre de plusieurs programmes de renforcement de capacités des PME burkinabè par des organisations canadiennes.
Le renforcement de la gouvernance et l’inclusion
Conscient de l’importance du secteur minier pour le Burkina Faso, le Canada s’est impliqué dans le renforcement de la gouvernance du secteur par les pouvoirs publics et sur l’amélioration des retombées socio-économiques du secteur extractif pour les collectivités, en particulier les femmes et les jeunes. Cela s’est réalisé respectivement à travers le Projet d’amélioration de la surveillance de l’industrie extractive en Afrique francophone subsaharienne (PASIE) qui a surtout travaillé au Burkina Faso avec la Cour des Comptes, puis, le projet d’Appui à la gouvernance et la croissance économique durable en zone extractive, particulièrement pour les communautés dans les régions de la Boucle du Mouhoun et des Hauts[1]Bassins. Le Canada s’est engagé depuis longtemps à favoriser l’autonomisation des femmes par le biais de son aide internationale. La Politique d’aide internationale féministe (PAIF) adoptée en 2017 a positionné le Canada comme un champion de l’égalité des sexes dans sa programmation d’aide internationale. C’est dans cette dynamique que l’ambassade du Canada au Burkina Faso a organisé, en collaboration avec l’Association des femmes minières du Burkina (AFEMIB), un atelier sur le rôle et la place des femmes dans le secteur minier burkinabè en mars 2019 et a facilité la participation de membres de l’AFEMIB à la 2e édition des Journées promotionnelles de la fourniture locale de biens et services miniers tenue à Bobo en octobre 2020.
Le partenariat public–privé pour renforcer le développement local dans les zones extractives
Dans le cadre de leur responsabilité sociale, certaines entreprises minières canadiennes ont réalisé des projets conjoints avec le gouvernement du Canada. Il s’agit entre autres de la construction et la mise en service d’une station de traitement d’eau pour les populations du Sahel, notamment la commune de Dori, par le biais du projet Eau et Croissance Économique Durable au Sahel (ECED-Sahel) avec une contribution significative de la société IAMGOLD. Ce projet d’un coût total de 17.4 millions de dollars canadiens (8 milliards FCFA) a été cofinancé par Affaires Mondiales Canada (6 milliards FCFA), la Fondation One Drop (1 milliard FCFA) et la société minière IAMGOLD (1 milliard FCFA). Exécuté sur 5 années (2015-2022), les infrastructures construites dans le cadre du projet ECED Sahel permettent désormais de couvrir les besoins en eau potable de la population de Dori et 13 villages environnants soit environ 60 000 personnes. Et pour ne pas s’arrêter en si bon chemin Mme Lee-Anne Hermann, ambassadrice du Canada au Burkina confie : « la 2e phase de ce projet est approuvée par le Canada pour 30 millions de dollars CAD (soit plus de 14 milliards de FCFA), encore une fois avec la participation de IAMGOLD, et cela dans l’optique d’étendre les services d’adduction en eau potable parmi bien d’autres actions planifiées pour les communes de Gorom-Gorom et Falangoutou ». Il en est de même du projet ECED[1]Mouhoun – Énergie et croissance économique durable dans la Boucle du Mouhoun où la société minière SEMAFO a œuvré aux côtés du Canada et d’autres partenaires locaux comme l’Agence Burkinabè de l’Électrification Rurale et la SONABEL en vue du renforcement d’un environnement propice pour l’électrification et au développement économique qui y est associé. Quant à la société minière ROXGOLD Sanu détenue aujourd’hui par le groupe canadien Fortuna Silver Mines et qui exploite la mine d’or de Yaramoko, dans la commune de Bagassi elle a collaboré à un important projet d’Appui à la gouvernance et à la croissance économique durable en zone extractive (AGCEDE). Ce programme a été mis en œuvre pendant six ans (2016-2022), conjointement par les Organisations non gouvernementales que sont Entraide universitaire mondiale du Canada (EUMC) et le Centre d’études et de coopération internationale (CECI), toutes des ONGs canadiennes. Mise en œuvre au Burkina Faso dans deux provinces, le projet AGCEDE a touché sept (07) communes (Houndé, Béréba, Békuy, Boni, Bagassi, Koumbia et Pompoi) et deux (02) villages de la commune de Boromo (Koho et Ouahabou).
Ces différentes initiatives sans être exhaustives renseignent sur le modèle d’affaire canadien qui associe ouvertement la responsabilité sociale des entreprises à la politique de coopération pour le développement. Un modèle bien apprécié par la société civile active dans le secteur minier au Burkina Faso. En 2021, à l’occasion de l’atelier de restitution de l’étude sur l’impact économique et social des investissements miniers canadiens au Burkina Faso commanditée par l’ambassade du Canada, les acteurs du secteur minier ont exprimé leur satisfaction et ont encouragé le Canada à renforcer cette dynamique pour que les impacts de ces investissements importants touchent d’avantage les populations locales. La nouvelle stratégie de conduite responsable des entreprises (CRE) tombe donc à point nommé pour poursuivre l’aventure au pays des hommes intègres.
Synthèse Elie Kabore