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Burkina/Mines et femme : « Il ne s’agit pas d’être une femme ou un homme, mais d’avoir les compétences demandées », souligne Annonciata Thiombiano

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Dans cette interview accordée au media en ligne, Minesactu.info, Annonciata Thiombiano, géographe de formation et spécialiste en santé- sécurité au travail, et l’environnement dans le secteur minier parle à cœur ouvert du secteur des mines et de la femme au Burkina. C’est une routière en la matière et elle totalise près de 16 ans d’expériences dans le domaine. Consultante aujourd’hui dans un cabinet et auprès de sociétés de forage minier, elle occupe aussi le poste de secrétaire générale de l’Association des Femmes du Secteur minier du Burkina (AFEMIB). Lisez plutôt !

Minesactu.info : Est-ce qu’aujourd’hui, on peut dire que le nombre de femmes dans le secteur minier a augmenté ?

Annonciata Thiombiano (AT) : Oui, rien que le 15 juin passé (2023), le Directeur général des mines, l’a noté dans son intervention au cours d’un webinaire que AFEMIB a animé. Il disait que si l’on fait une comparaison entre les statistiques de présence de femmes dans les postes de responsabilités au niveau mondial dans le secteur minier qui est environ 17 %, le Burkina avec 16 % est plutôt bien coté de présence de femmes dans le secteur. Donc, on peut dire que nous sommes bien logées sur le plan mondial.

Quels sont les domaines dans lesquels, l’on retrouve beaucoup plus de femmes dans le secteur minier ?

Au niveau de la composition par secteur d’activités, en prenant en compte les femmes dans les compagnies minières et les sous-traitants, on voit qu’elles sont plus dans le secteur administratif (35,04% ) que dans les opérations (9,79%), selon les données 2022 de la Direction générale des Mines et de la Géologie (DGMG). Cela s’explique naturellement. Par exemple, sur le plan administratif, au niveau des comptables, des ressources humaines, et dans un certain nombre de services d’appui, on a plus besoin des femmes. Maintenant, quand, on prend le secteur technique, au niveau des opérations, par exemple au niveau de la flotte, dans la conduite des engins, on privilégie de plus en plus les femmes mais les statistiques restent toujours faibles (2, 8 %) et sous-traitants compris). Parce qu’on se rend compte que la manière de rouler le même modèle d’engins est différent que l’on soit homme ou femme. L’usure n’est pas pareille. L’engin conduit par la femme est mieux suivi, mieux conservé par rapport à celui utilisé par un homme. Donc, de plus en plus, dans la conduite des dumpers et des gros engins, on privilégie de plus en plus les femmes, et cela est visible même au-delà du Burkina, sur le plan mondial. Cependant, il faut noter à ce niveau qu’il y a peu de femmes compétentes à ce niveau.

Annonciata Thiombiano, Secrétaire générale de l’Association des Femmes du Secteur minier du Burkina (AFEMIB)

Est-ce qu’en tant qu’association féminine qui fait la promotion de l’insertion professionnelle des femmes dans le secteur minier, vous arrivez à trouver de l’emploi pour des femmes dans le domaine ?

Oui, mais pas de façon formelle. On a des rencontres qui permettent aux membres de se faire un carnet d’adresses fourni, et qui ouvre souvent des portes d’emplois. A titre d’exemple, on a des consœurs qui ont été nommées à des postes de responsabilité par ce biais. Et également avec les étudiantes qui veulent des stages, on essaie de les aider à trouver des stages. Nous sommes dans cette dynamique puisque nous devions mêmes signer un partenariat avec la chambre des mines afin de pouvoir intervenir à cet effet, mais il nous manque des outils. Sinon jusque-là, on a des membres qui ont pu avoir accès à des postes grâces à nos interventions. On ne manque pas de plaider la cause des femmes auprès des sociétés, mais cela se fait de façon informelle. Le processus formel est en cours, mais il n’est pas encore achevé.  

Aujourd’hui, quels sont les défis majeurs à relever pour qu’on puisse atteindre peut-être 30 % du personnel minier ?

C’est peut-être encourager les femmes à découvrir d’abord, quels sont les métiers que l’on trouver dans les mines, à les aimer et on s’oriente vers ses filières là, on fait la formation et on essaie d’avoir toutes les capacités demandées pour exercer dans ces domaines. Sinon, il n’y a pas de favoritisme.

On dit que si vous êtes une femme, soit vous connaissez quelqu’un, ou soit vous vous donnez pour pouvoir se faire recruter dans une mine. En tant qu’association féminine défendant la femme, quel commentaire faites-vous de ces dires ?

Comme vous le dites, dans tous les secteurs d’activités, il y a toujours ces préjugés. Il n’y a rien d’extraordinaire dans le secteur minier. Tout ce qui se passe dans les autres secteurs, se passent aussi dans le secteur minier. Quoique maintenant avec la prise en compte de l’inclusion des femmes est devenue une affaire mondiale, il y a de l’espoir qu’il y ait encore plus de de femmes dans ce secteur. Il y a des structures qui précisent mêmes au niveau des appels à candidature que les candidatures féminines sont à encouragées. Par moment à compétence égale, on privilégie la femme.

Par rapport à ce que les gens disent sur le fait de se donner pour avoir un travail, il y a un Code de bonne conduite que toutes les structures ont signé et que tout le monde est tenu de respecter. Il y a des mesures qui sont mises en place pour combattre les mauvaises pratiques. C’est vrai qu’il y a des brebis galeuses, mais il faut postuler comme tout le monde. Et si vous avez la chance, vous serez retenus Il n’y a rien de particulier dans le secteur minier. C’est la même chose partout et même à la fonction publique, on dit souvent que si vous ne déposez pas de cailloux, votre dossier ne sera pas retenu. Mais on rencontre des personnes qui sont retenues sans intervention. C’est parce qu’il y a plus de demandes que l’offre qui fait que le choix est difficile. Ce que moi je conseille aux gens, c’est qu’il faut bien se préparer dans le secteur dans lequel, l’on veut mettre les pieds. Les sociétés minières sont pour la plupart cotées en bourse et elles ne s’amusent pas avec le travail et elles ne permettront pas qu’il y ait des gens incompétents dans leur équipe. Ce sont les résultats qui comptent. Les compétences techniques comptent pour 20 % (Hard Skills), et les comportements personnels (Soft Skills) qui vont compter pour 80%. Donc, il faut travailler le comportement, le savoir-être, la manière d’être. Le diplôme seul ne suffit plus et si vous passez par la petite porte, ça va vous rattraper. C’est un milieu très sélectif et l’excellence est très recherchée. Il ne s’agit pas d’être femme ou homme, mais il s’agit d’avoir les compétences demandées. Le choix se fait sur la compétence et à compétence égale avec un homme, la femme peut passer. Donc, il y a des gens qui pensent qu’il suffit d’être femme et comme on privilégie les femmes, on les privilégiera. On vous privilégiera d’abord à condition que vous soyez à compétence égale avec l’homme. Sinon, si l’homme est plus compétent que la femme, l’homme sera choisi.

C’est vrai qu’on parle d’émancipation de la femme dans tous les secteurs d’activités. Est-ce que dans le cas des mines, il y a un domaine dans lequel, les femmes ne peuvent pas exercer ?

Non, je ne pense pas. Les femmes peuvent travailler dans tous les domaines des mines. Le seul problème, c’est qu’il y a des situations justes exceptionnelles par rapport à leur maternité et il y a des domaines, lorsqu’une femme est enceinte, elle ne peut plus exercer son travail. On la met dans un autre domaine en attendant qu’elle accouche, avant de reprendre son travail afin de ne pas exposer la vie de l’enfant, parce qu’il n’y a pas de risque zéro. Sinon elles sont aptes à occuper tous les postes tant qu’elles ont la compétence. En plus de cela, il faut aussi souligner qu’il y a aussi des exceptions. Par exemple dans le forage minier, c’est un domaine très difficile et jusqu’à présent, je n’ai pas encore vu de femmes au niveau du Burkina qui est foreur ou aide-foreur.

Votre dernier mot ?

 Ce que je peux ajouter, c’est que quand, on est jeune fille ou jeune garçon, il faut être curieux dans les domaines qui s’ouvrent à nous. Parce que généralement, on se fait prendre par des tendances ou on choisit des filières qui marchent, et tout le monde s’oriente là-bas parce que ça marche. Il faut surtout s’orienter vers des filières que l’on aime. Parce que quand on n’aime pas un domaine, on peut avoir des diplômes sans réussir dans ce domaine parce que le cœur n’y ait pas. Quand on aime quelque chose, on est prêt à tout faire et on fournit des efforts. La volonté se base d’abord sur l’amour qu’on a pour la chose. Et quand on fait quelque chose par amour, par passion, on ne voit jamais les difficultés. Il faut aimer le travail en général, et aimer en particulier le travail minier qui va jusqu’à 12 heures par jour.

Interview réalisée par Sidi Béwendé

#Mines_Actu_Burkina

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