Mamou SONTIE est ingénieur géologue de formation, en service à la Direction générale du Cadastre minier. Dans un entretien accordé à la rédaction de Minesactu.info, elle donne un bon témoignage sur comment elle a pu surmonter les préjugés et les discriminations pour s’imposer dans un milieu vu comme masculin. Pour elle : « Les femmes doivent se battre dans ce milieu pour prouver qu’elles ont les mêmes compétences que les hommes ».
Minesactu.info : Partagez-nous votre expérience dans un secteur minier connu comme un milieu masculin ?
Mamou Zontié : J’ai commencé ma carrière en fin 2010. Comme tout étudiant en fin de cycle en géologie, je déposais mes dossiers de demande de stage un peu partout dans les sociétés minières. Une structure m’a appelée un jour pour un entretien, à l’issue de cet entretien, j’avais été retenue ainsi que d’autres promotionnaires de sexe masculin. Ces derniers avaient signé leur contrat de stage avant de commencer le stage pratique de terrain. Cependant, je devais aller faire mes preuves sur le terrain avant de signer mon contrat de stage. Sur le terrain, j’ai encore rencontré d’autres difficultés. Mes supérieurs me testaient tout le temps. Le premier jour de stage, ils m’ont informé que l’heure de départ était fixée à 05 h 00 du matin pendant que la bonne heure, c’est à dire 6H30, était donnée aux autres. A 4 h 30 du matin, j’étais déjà prête et j’ai dû attendre les autres à 06h30. C’est en ce moment que mon chef de projet m’a informé que c’était pour tester ma ponctualité. Après avoir passé 02 semaines sur le site, je suis rentrée à Ouagadougou pour le repos. Le chef de projet m’a avoué que je l’ai beaucoup surpris parce qu’il ne s’attendait pas à ce que j’assure les travaux qu’il me confiait. C’est à partir de cet instant que j’ai signé mon contrat de stage de 03 mois qui a ensuite été renouvelé. A l’issue du stage, j’ai pu avoir un emploi.
Avez-vous rencontré d’autres difficultés liées à votre statut de femme ?
J’ai rencontré des difficultés au niveau maternité. Aucune faveur n’était prévue au profit des femmes dans cet état. Je devais travailler 21 jours comme les autres, aux postes de nuit comme les hommes. Après le congé de maternité, j’ai sollicité un certain nombre de faveurs dont la possibilité de garder mon enfant sur le site. Cette faveur m’a été refusé avec des menaces sur le renouvellement de mon contrat.
J’ai été obligée de louer une maison au village et solliciter les services d’une personne pour s’occuper de mon enfant pendant que je travaillais. C’était pareil pour la seconde maternité.
J’avoue que je n’ai pas baissé les bras. J’ai dû persévérer pour relever ces défis.
Un recrutement a été lancé à la mine souterraine. J’ai postulé et j’ai été retenue. Le manque de traitement de faveur ne me dérangeait pas du tout. Je travaillais comme les hommes qui avaient le même profil que moi. C’est après que le ministère des mines a lancé un recrutement pour les ingénieurs géologues. J’ai postulé et j’ai été recruté. Actuellement, je suis agent à la Direction générale du cadastre minier.
Quel est votre message à l’endroit des filles et femmes ?
J’interpelle toutes les femmes à se battre d’abord. Celles qui pensent que pour travailler dans une mine, il faut avoir les bras longs ou sortir avec quelqu’un qui travaille dans les mines, c’est des histoires. Il faut d’abord se former et ensuite se battre : se battre doublement pour mériter la confiance. Le milieu, il faut le reconnaître, il est masculin, les femmes doivent donc se battre pour montrer au monde entier qu’elles sont capables de travailler au même titre que les hommes ayant les mêmes profils et les mêmes compétences qu’elles.
Propos recueillis par Elie KABORE
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