Le secteur minier ivoirien emploie environ 10% de femmes. Peu de femmes occupent des postes de responsabilités. Des femmes sortent du lot. C’est le cas de Laetitia Gadegbeku Ouattara, Directrice pays / vice-présidente Affaires publiques du Groupe Endeavour Mining pour la Côte d’Ivoire. Elle est la 3e vice-présidente du Groupement professionnel des miniers de Côte d’Ivoire, la Chambre des mines de Côte d’Ivoire. Titulaire d’un MBA, elle a travaillé d’abord au Canada, avant de rentrer en Côte d’Ivoire « pour y apporter ma contribution », selon ses dires. « Amoureuse » du secteur minier encore peu connu en Côte d’Ivoire, elle est depuis 2020, Directrice-Pays d’Endeavour Mining en Côte d’Ivoire.
Mines Actu Burkina : Décrivez-nous votre parcours professionnel
Laetitia Gadegbeku Ouattara : Ma carrière professionnelle a débuté au Canada où j’ai obtenu mon premier emploi en tant que Coordinatrice des ventes dans une petite et moyenne entreprise (PME) qui s’appelait Mad Science, juste après l’obtention de mon MBA.
Après avoir travaillé 2 ans et demi pour cette entreprise, j’ai été débauchée par ING Canada, le plus grand groupe d’assurance au Canada, en tant que Conseillère Développement des affaires pour après occuper le poste de Directrice Développement des affaires en charge d’une région du Québec appelée la Montérégie. J’ai travaillé environ 5 ans pour cette compagnie, avant de ressentir le besoin de rentrer dans mon pays pour y apporter ma contribution.
J’ai donc eu la grâce de décrocher un emploi comme Conseillère commerciale du Canada en Côte d’Ivoire, avec accréditation au Liberia. J’y ai donc passé 10 ans à faire la promotion des investissements canadiens dans les pays de couverture et à favoriser des partenariats économiques et commerciaux entre la Côte d’Ivoire et le Canada. C’est à l’occasion de cet emploi que je me suis familiarisée avec le secteur minier et en suis tombée littéralement « amoureuse ».
Je me suis donc préparée pour embrasser une carrière dans ce secteur, encore peu connu en Côte d’Ivoire. C’est ainsi qu’en 2020, j’ai eu le poste de Directrice-Pays d’Endeavour Mining en Côte d’Ivoire.

Quelle est la place de la femme dans le secteur minier ivoirien ?
On estime qu’il y a environ 10% de femmes dans le secteur minier ivoirien et encore très peu à des postes de direction. Il faut avouer que le secteur minier, à première vue, peut sembler peu attirant pour des femmes, surtout pour des emplois basés sur les sites.
Certaines compagnies ont adopté des politiques pour attirer plus de candidatures féminines et pour améliorer les conditions d’emploi des femmes. Par exemple, Endeavour Mining permet aux femmes de bénéficier de congés de maternité pouvant aller jusqu’à 9 mois, voire 12 mois.
Il y a un grand travail à faire pour susciter des vocations dans le secteur minier. La plupart des sites miniers ont des associations de femmes très dynamiques qui permettent aux femmes d’avoir des cadres d’échange, de réseautage mais surtout de coaching et de renforcement de capacités. En Côte d’Ivoire, il y a aussi l’association HeforSheMines Côte d’Ivoire, une association d’hommes du secteur minier qui s’engage à promouvoir une masculinité positive et l’émergence de talents féminins dans les entreprises respectives. J’ai l’honneur d’avoir aidé à la création de cette association et d’en être la Conseillère. L’association mène plusieurs actions pour susciter des vocations auprès des jeunes lycéennes et étudiantes, mais aussi pour proposer des recommandations, afin d’améliorer les statistiques de femmes dans le secteur minier.
Que doivent faire l’Etat ivoirien et les sociétés minières afin d’augmenter le nombre de femmes dans le secteur minier?
Je crois que si les conditions sont réunies pour que les femmes puissent vivre leur féminité, il y aurait plus de femmes dans notre secteur.
Par féminité, j’englobe tous les aspects de la vie d’une femme, à savoir la maternité, la vie de couple et la gestion des enfants, le bien-être.
Des politiques, qui favoriseraient des congés de maternité plus longs que la norme, qui permettraient aux femmes de passer des moments de qualité avec leur famille (temps de rotation, crèche en entreprise, etc.) ou qui prendraient en compte les besoins spécifiques des femmes, aideraient sans doute à attirer plus de femmes dans ce beau secteur qu’est le secteur minier, un domaine vecteur de développement pour nos économies.
Avez-vous déjà rencontré des difficultés liées à votre statut de femme
Pour être honnête, je n’ai jamais ressenti de la discrimination ou de l’intimidation … peut-être que ma personnalité m’y aide (sourire). La seule difficulté que je pourrais noter est la conciliation vie familiale et vie professionnelle. Dans notre société africaine, à ce poste de responsabilité, il peut m’arriver des fois où j’ai à gérer les courses de la maison ou les séances de coiffure des enfants, pendant que je suis à des réunions importantes ou que je suis en train de gérer une situation d’urgence. C’est un équilibre qu’il faut de toutes façons trouver en ayant recours à des aides.

Quel conseil pouvez-vous donner aux filles et aux femmes qui désirent travailler dans le secteur minier ?
Le premier conseil que je peux donner à mes cadettes est de cultiver une véritable confiance en elles qui leur permette de s’affirmer, de défendre leur position avec des arguments logiques, factuels mais surtout avec un apport de solutions. Les femmes ont tendance à se convaincre qu’elles sont capables d’assumer un poste lorsqu’elles y sont et ont prouvé avec des résultats. Il faut donc qu’elles osent postuler et se donner ensuite les moyens de réussir (formation, perfectionnement, coaching …)
Il faudrait aussi que les femmes apprennent à se constituer un réseau fort qui peut les référer lorsqu’il y a des ouvertures de postes.
Le secteur minier reste un milieu très masculin, ce serait bien que les femmes apprennent à parler et comprendre le langage des hommes (sourire & clin d’œil).
Interview réalisée par Elie KABORE
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