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« Le Burkina Faso va définir une stratégie sur les minéraux critiques», Aristide Bélemsobgo, Directeur Général des Mines et de la Géologie (DGMG)

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Aristide Bélemsobgo, Directeur général des Mines et de la Géologie (DGMG) depuis avril 2023

Pourquoi les minéraux critiques sont importants pour un pays ? Comment s’effectue le suivi-contrôle du secteur minier industriel et du secteur artisanal ? Aristide Bélemsobgo, Directeur général des Mines et de la Géologie (DGMG) depuis avril 2023, répond à ces questions posées par Mines Actu Burkina.

Mines Actu Burkina : Quel est l’état des lieux actuel du secteur minier burkinabè ?

Le secteur minier burkinabè reste dynamique, malgré les nombreux défis dont il fait face. En 2023, avec une production annuelle de 56,847 tonnes d’or fin, elle était légèrement en baisse (1,4%) par rapport à celle de 2022, où la production minière d’or fin était de 57,674 tonnes. Avec 12 mines ayant contribué à cette production, la baisse observée est en lien avec la non-atteinte des objectifs des mines de Boungou, de Yimiougou et de Taparko. Cette production globale a néanmoins permis de générer plus de recettes d’exportation, des recettes pour le Budget de l’Etat et pour le Fonds minier de développement local, au regard de la flambée du cours de l’or et de la révision du décret portant taxes et redevances minières, qui consacre une augmentation des royalties pour s’aligner à cette flambée du cours de l’or. Par contre, la production minière artisanale et semi-mécanisée a faiblement contribué, au regard d’une faible production déclarée de 491 kg.

Au premier semestre 2024, sur les 12 mines qui avaient produit en 2023, seule la mine de Boungou n’a pas fourni de production aurifère, eu égard à des difficultés d’approvisionnement de la mine en biens et services miniers à cause de la situation sécuritaire. Ce qui fait que la production au premier semestre 2024, qui est de 26,554 tonnes, est légèrement en baisse par rapport à la production aurifère de la même année. La production minière au premier semestre 2024 a permis de générer au compte des recettes d’exportation 1 140 milliards FCFA, 79,29 milliards FCFA de royalties et 11,42 milliards FCFA au compte du Fonds minier de développement local (FMDL).

Il est important de noter la hausse de la contribution de la production formelle d’or artisanale et semi-mécanisée qui a atteint un niveau record de 3,927 tonnes au 31 juillet 2024. Pour une prévision annuelle de production de 500 kg, en 7 mois en 2024, cette quantité formelle est un record jamais atteint au Burkina Faso. Elle peut être en lien avec la note du gouvernement en février 2024, interdisant l’exportation par les sociétés privées, de l’or de production artisanale et semi-mécanisée. La formalisation et l’encadrement de l’artisanat minier devront permettre un meilleur contrôle et une meilleure contribution de la production aurifère de ce sous-secteur au Budget de l’Etat.

De nombreux indices, prospects et gîtes de nickel, d’aluminium, de cobalt et de lithium sont répertoriés dans le pays. 

Le Burkina Faso dispose-t-il de minéraux critiques ?

Pour ce qui est du cas du Burkina Faso, les minéraux critiques pour la transition énergétique ou minéraux verts selon la définition de l’Union africaine, ou minéraux de la transition énergétique selon la définition de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE) sont présents au Burkina Faso. Certains tels que le zinc, le manganèse et le cuivre ont déjà fait l’objet d’exploitation. Mais de nombreux indices, prospects et gîtes de nickel, d’aluminium, de cobalt et de lithium sont répertoriés dans le pays. Des travaux supplémentaires du BUMIGEB et des sociétés minières devront permettre de mieux définir leur potentialité.

Mais il y a lieu effectivement pour le Burkina Faso de définir une liste de minéraux critiques en fonction de sa vision de développement. C’est dans ce cadre qu’un atelier préliminaire a été organisé en décembre 2023, afin de réfléchir sur la définition d’une liste de minéraux critiques susceptibles de contribuer au développement et à la souveraineté du pays, notamment, dans l’économie, l’énergie, l’agriculture, etc. Un atelier national permettra d’arrêter une liste définitive de minéraux critiques pour le Burkina Faso et de définir une stratégie pour la recherche, l’exploitation et l’utilisation de ces minéraux au Burkina Faso.

Pourquoi les minéraux critiques sont importants pour un pays ?

Avant toute chose, il est important de définir la notion de minéraux critiques. En effet, les minéraux critiques sont des ressources minérales qui revêtent une importance cruciale pour l’économie mondiale et pour diverses industries (stratégiques pour l’économie), mais qui présentent des risques en termes d’approvisionnement en raison de leur rareté, de leur concentration géographique, la géopolitique, de leur vulnérabilité aux fluctuations des marchés mondiaux, ou de leur dépendance à des chaînes d’approvisionnement complexes. La criticité des minéraux varie en fonction des besoins et des orientations politiques et économiques des pays. Par exemple, les minéraux tels que l’or, l’uranium ou le fer sont critiques pour la Chine, mais non pour les pays de l’Union européenne et les Etats-Unis. Par contre, certains minéraux demeurent critiques pour la plupart des pays développés. Ce sont le lithium, le graphite, le cobalt, le cuivre, le zinc, le manganèse, l’aluminium, etc. Cette criticité est liée au fait que ces minéraux sont essentiels au développement de nouvelles technologies pour la transition énergétique. En règle générale, il appartient à chaque pays de définir ses minéraux critiques en fonction de ses besoins.

Le Burkina Faso dispose-t-il d’un cadre politique ou légal sur les minéraux critiques ?

Pour le moment, le Burkina ne dispose pas d’un cadre politique sur les minéraux critiques, même si dans la stratégie des Mines et des Carrières 2017-2026, il est prévu la diversification de la production minière. Actuellement, avec la vision du monde vers ces minéraux critiques, le Burkina Faso va définir, à l’instar de certains pays africains tels que le Ghana et la Zambie, une stratégie sur les minéraux critiques. Déjà, dans la loi 016-2024/ALT du 18 juillet 2024, à son article 5, il est prévu pour des questions d’ordre stratégique, la définition d’une liste de minéraux à considération particulière. Cela est donc un tremplin qui permettra la prise de textes règlementaires spécifiques pour ces minéraux.

Interview réalisée par Elie KABORE

#Mines_Actu_Burkina

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