Une grande partie de la production artisanale de l’or au Burkina Faso fait l’objet de fraude à la commercialisation.
Selon plusieurs sources, entre 9 et 30 tonnes d’or de production artisanale sortiraient illégalement du territoire national chaque année. Cette fraude entretient d’importants flux financiers illicites et un important préjudice financier, des centaines de milliards FCFA pour le Budget national.
Les rapports annuels de la Brigade nationale anti-fraude de l’or (BNAF) sur l’état de la fraude en matière de commercialisation de l’or et des autres substances précieuses donnent des indications sur les pratiques frauduleuses.
Le rapport de 2023 indique une saisie de 172,78 kg de faux lingots d’or utilisés dans les actes d’escroquerie portant sur des transactions illégales d’or. La BNAF a aussi saisi 10,075 kg d’or en 2023, qui ont été réinjectés dans le circuit légal. Cette saisie a permis le recouvrement de plus de 9,620 milliards FCFA au profit du Trésor public.
Les pays de destination sont connus
L’or est fraudé à destination des pays voisins comme le Togo, le Mali, le Ghana, la Côte d’Ivoire, le Niger, le Bénin, mais aussi à travers d’autres pays africains, dont le Rwanda et l’Ouganda. Des pays européens figurent sur la liste, dont la Suisse, le Royaume-Uni, le Luxembourg, les Pays-Bas, le Portugal, l’Allemagne, l’Espagne. Les pays asiatiques ne sont pas en reste. On y retrouve l’Inde, le Japon, les Emirats Arabes Unis, le Koweït, l’Arabie Saoudite.
Pendant que le Burkina Faso n’arrive pas à capter une demi-tonne d’or de la production artisanale par an, des institutions spécialisées évaluent à environ 30 tonnes, la quantité d’or artisanale exportée et non déclarée.
En effet, le total de la production d’or artisanal déclaré en 2023 par la Direction générale des mines et de la géologie (DGMG) est de 490 kg d’or artisanal d’une valeur de 20,45 milliards FCFA. Cette production était de 484 kg en 2022 et 270 kg en 2021.
Cette faible production a été obtenue malgré l’importance des acteurs de ce secteur. Les chiffres du cadastre minier ont dénombré 16 permis d’exploitation semi-mécanisée de substances de mines et 7 autorisations d’exploitation artisanale de substances de mines en 2023.
D’autres sources dénombrent entre 450 et 800 sites de production artisanale de l’or sur l’ensemble du pays, exploités de manière anarchique, informelle et illégale.
Conscient de la situation de perte de recettes, le gouvernement actuel a pris une série de mesures dont les résultats sont perceptibles.
En février 2024, il a pris une mesure interdisant l’exportation de l’or artisanal et semi-mécanisé. Les acteurs de la chaîne de commercialisation ont été obligés de vendre leur or en interne.
8 tonnes collectés en 2024
Pour faciliter l’achat de cet or, le gouvernement a créé, le 24 octobre 2023, la Société nationale des substances précieuses (SONASP), qui a remplacé l’Agence nationale d’encadrement des exploitations minières artisanales et semi-mécanisées (ANEEMAS). Ces mesures ont permis à la SONASP de capter environ 8 tonnes d’or de production artisanale pour la seule année 2024. Si une grande différence existe entre les 30 tonnes d’or fraudées et les 8 tonnes d’or captées par la SONASP, force est de reconnaître que des efforts sont faits pour limiter la fraude. D’autres mesures prises vont contribuer à réduire la fraude.
C’est le cas des innovations apportées dans le Code minier. Le Code définit pour la première fois l’artisan minier comme « toute personne physique de nationalité burkinabè exerçant sur un site d’exploitation artisanale, une activité d’exploitation ou de traitement et détentrice d’une carte d’artisan minier ». Il réserve l’exploitation artisanale de l’or exclusivement aux nationaux. Désormais, il est interdit d’exporter l’or de production semi-mécanisée.
Le Code minier donne le droit de préemption de l’Etat pour la commercialisation de l’or et des autres substances minérales d’exploitation semi-mécanisée et artisanale en cas de vente de ces produits.
Il crée des couloirs d’exploitation artisanale des substances minérales au profit des artisans miniers et leur accorde la possibilité d’être actionnaires dans la société d’exploitation industrielle d’au moins 10% ou d’être indemnisés par celle-ci au cas où la superficie du site de l’exploitation artisanale était couverte par un permis d’exploitation industrielle de grande ou de petite mine.
Toutes ces mesures vont renforcer la lutte contre la fraude à la commercialisation de l’or issue de la production artisanale et semi-mécanisée, professionnaliser les artisans miniers et augmenter les gains pour l’Etat et les exploitants.
E K
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