Le Bureau des mines et de la géologie du Burkina Faso (BUMIGEB) est un acteur majeur dans le secteur de la géologie et de l’exploitation minière. Fondé en 1978, le BUMIGEB joue un rôle vital dans l’amélioration de la connaissance géologique et la promotion d’une exploitation durable des ressources minières variées qu’offre son sous-sol. Selon son Directeur général Samuel Guiguemdé, cette société est un héritage des devanciers du domaine qui ont œuvré pour la valorisation du sous-sol burkinabè. Dans cet entretien, il revient sur les fondements du Bureau des mines et de la géologie du Burkina Faso.
Pouvez-vous présenter brièvement le BUMIGEB ?
Le Bureau des Mines et de la Géologie du Burkina (BUMIGEB) est le Service géologique national du Burkina Faso. Il peut être qualifié de bras technique du Ministère chargé des mines. C’est une société d’Etat à caractère stratégique dont le capital est entièrement détenu par l’Etat burkinabè. Il a été créé en Mai 1978. Donc a de plus de quarante-cinq (45) ans d’existence.
Quelles sont les principales missions du BUMIGEB ?
Plusieurs missions ont été confiées au BUMIGEB par l’Etat. Les principales missions du BUMIGEB, se résument pour l’essentiel à la réalisation, par toutes méthodes appropriées, d’études et de travaux destinés à améliorer la connaissance géologique et minière du pays, assurer divers contrôles miniers délégués par l’Etat, appuyer la promotion et le développement de la petite mine, appuyer la promotion et la valorisation des substances minérales et de carrières contenues dans le sol et le sous-sol et plus généralement, entreprendre ou participer à toutes opérations industrielles, commerciales, financières, mobilières ou immobilières pouvant se rattacher à l’un des objets précités ou à tout objet similaire ou connexe.
Comment est organisée le BUMIGEB pour la réalisation de ses missions ?
Le BUMIGEB est dirigé par un Directeur Général, nommé en conseil des Ministres dont la gestion est contrôlée par un Conseil d’Administration. Il compte une direction générale appuyée dans la mise en œuvre de ses actions par des cellules et plusieurs autres directions dont quatre (4) techniques et trois (3) s’occupant des aspects administratifs et financiers, commerciaux et de gestion des ressources humaines. Les directions techniques sont constituées de la Direction de la Recherche géologique et minière, la direction des Laboratoires, la direction des sondages et celle de la sécurité industrielle, minière et des hydrocarbures. Les trois premières sont chargées de réaliser les cartes géologiques à diverses échelles et des cartes de potentialités minières dont elles assurent la diffusion auprès des potentiels investisseurs miniers afin de les convaincre à faire du Burkina leur pays de choix pour d’éventuels investissements. La dernière assure le contrôle de sécurité dans les industries, dans les mines et dans le transport et la distribution des hydrocarbures. Le BUMIGEB a une représentation au niveau régional à Bobo[1]Dioulasso, la deuxième ville du Burkina Faso. Elle exécute les mêmes activités que le BUMIGEB siège mais uniquement dans le Grand Ouest. Les activités sur les autres parties du territoire sont exécutées par le BUMIGEB siège.
Le Burkina Faso a été longtemps qualifié de pays à sous-sol pauvre, qu’est ce qui justifie selon vous qu’il soit cité parmi les pays producteurs d’or en Afrique aujourd’hui ?
Merci de permettre à travers cette question de rendre hommage à nos devanciers. Pour revenir à votre question, je dirai la curiosité de nos devanciers et leur désir ardent de démontrer le contraire. Vous savez, nous avons des aînés qui ont cru au sous-sol Burkinabè lorsque personne n’y croyait. Pour l’amour de leur pays, ils ont pris le risque de se former à l’étranger dans des domaines de géosciences. Une fois rentrés au pays, ils ont œuvré à ce que soit créé le BUMIGEB et ont intensifié des travaux de recherche géologique et minière qui leur ont permis de démontrer le contraire. Pour preuve, plusieurs des mines qui opèrent aujourd’hui au Burkina Faso, sont sur les zones dont ils ont mis à nu quasiment les potentialités. Nous avons hérité des résultats de leurs recherches mais aussi de leur détermination à démontrer que le sous-sol du Burkina Faso regorge de biens d’autres potentialités. Pour résumer, nous perpétuons l’héritage qui nous a été légué. Nous poursuivons ce travail et le BUMIGEB continue de mettre en évidence des minéralisations contenues dans le sous-sol du Burkina.
Quels sont les canaux utilisés par le BUMIGEB pour la promotion des données géoscientifiques sur le Burkina Faso ?
Nous utilisons principalement trois canaux. Il s’agit de notre centre de documentation bien organisé qui regorge de milliers de documents sur la recherche géologique et minière au Burkina Faso, de notre géoportail à travers notre site internet sur lequel, nous avons œuvré à mettre des fichiers numériques des données géologiques et minière sur le Burkina Faso. Enfin, nous utilisons le Marketing direct. A travers les foras miniers nationaux comme internationaux, nous allons à la conquête des potentiels investisseurs miniers à qui nous présentons les potentialités minières du pays.
Parlant de géoportail, il parait que le BUMIGEB est dans la dynamique de la mise en place d’un hub technique minier. De quoi s’agit-il exactement ? Comment fonctionnera-t-il ?
Effectivement, nous sommes dans la dynamique de mettre en place un hub technique minier. Pour faire simple, il s’agit d’une plateforme numérique sur laquelle seront regroupées les données des acteurs clés intervenant dans le secteur minier au Burkina Faso, de sorte à faciliter l’accès à l’information juste de différents acteurs en un seul endroit. Ainsi, le BUMIGEB est le porteur du projet, mais bien d’autres acteurs, en occurrence le cadastre minier, la chambre des mines du Burkina, … interviendront sur ce projet afin de réussir sa mise en œuvre.
Comment sont financées les activités du BUMIGEB ?
Les ressources financières du BUMIGEB sont constituées, d’une part, des ressources provenant de la contrepartie de contrats plans quinquennaux signés avec l’Etat pour le financement des missions de service public et, d’autre part, des produits des travaux et prestations pour des tiers. En outre, le BUMIGEB a bénéficié également des appuis divers à travers la coopération bilatérale et multilatérale par le biais de divers projets miniers (BM, UE, PNUD, FAC, ACDI, BGR, Hollande, Belgique, PADSEM, PARGFM, etc.). Une autre source de financement rejoint la première. Il s’agit du Fonds de Financement de la Recherche Géologique et Minière et de soutien à la formation sur les sciences de la terre (FFRGM) qui a été institué par le code minier de 2015.
Au Burkina Faso, seul l’or est exploité aujourd’hui, cela sous-entend-il que son sous-sol ne contient que l’or ?
Loin de là. Rappelez-vous que dans un passé récent le manganèse et le zinc étaient exploités au Burkina Faso. En nous basant sur ces deux ressources dont les gisements n’ont pas été épuisés, vous voyez aisément qu’au Burkina, nous n’avons pas que l’or. Dans un passé assez lointain des métaux comme le cuivre, le plomb et l’antimoine ont fait l’objet d’exploitation. Par contre, beaucoup d’autres substances minérales sont mises en évidence, mais toujours pas exploités, on note : le diamant, le fer, le Titane, le Vanadium, le nickel, l’Aluminium, le Niobium[1]Tantalium, l’Etain, le Lithium, les terres rares. A ces substances métallifères, s’ajoutent les substances non métalliques communément appelées substances de carrières comme les phosphates, les calcaires à ciment, les dolomies, les marbres, les granites, les gabbros, les grès, etc. Actuellement, nous intensifions la recherche géologique et minière via plusieurs projets afin d’aboutir à une diversification de la production minière.
Quels sont donc les projets de recherche que vous menez actuellement pour la diversification des substances minérales exploitables ?
Actuellement, nous menons des travaux de cartographie à l’échelle 1/50 000 sur plus d’une dizaine de feuillets. Notre ambition est de couvrir totalement le territoire à cette échelle. Vous savez, en matière de cartographie géologique, le Burkina est cité parmi les pays de la sous-région le plus avancé. Nous avons couvert totalement notre territoire à l’échelle 1/200 000 et ce qui a permis de réviser la carte synthèse à l’échelle 1/1 000 000 (2018). De la recherche minière, le pays est totalement couvert en géophysique aéroporté en spectrométrie et magnétométrie de haute résolution qui a permis de mettre en évidence des zones d’anomalies très intéressantes sur lesquelles nous menons actuellement des contrôles approfondis au sol. Dans la même lancée, nous conduisons des projets de recherche minières pour des substances déjà bien connues comme l’or, mais pour d’autres substances spécifiques et aujourd’hui critiques ; on peut citer les terres rares, le nickel, le manganèse, le lithium, les colombo-tantalite, le vanadium… Enfin, nous avons entamé des études sur les études des bassins sédimentaires pour comprendre leurs fonctionnements et répondre à l’existence ou non des hydrocarbures dont nous disposons déjà d’une étude de faisabilité et d’un projet de code pétrolier.
A quels niveaux sont les projets de recherche dont vous parliez tantôt ?
Nous sommes suffisamment avancés sur certains projets. D’autres par contre sont moins avancés du fait du contexte sécuritaire. Mais nous avons la ferme conviction que bientôt les zones abritant lesdits projets seront propices à l’intensification de la recherche pour nous permettre d’avancer considérablement. Bientôt, nous diffuserons un rapport technique de la recherche géologique et minière sur le Burkina Faso qui fait la synthèse de l’avancée de tous nos différents projets.
Pouvons-nous conclure sans crainte de se tromper l’existence d’autres ressources minérales autres que l’or dans le sous-sol burkinabè ?
Nous avons mis en évidence plusieurs indices de minéraux qui témoignent déjà de l’existence d’autres ressources minérales autres que l’or au Burkina. Maintenant, il appartient aux compagnies d’explorations d’approfondir les recherches afin de découvrir de nouveaux gisements. Pour cela, nous mettons d’une part à profit les foras pour intéresser les potentiels investisseurs miniers. D’autre part, nous ne ménageons aucun effort pour mettre à leur disposition nos expertises à travers des conventions de partenariats dans les domaines de l’exploration géologique et minière, des travaux de sondages miniers, des travaux d’analyses de roches et sols dans notre laboratoire accrédité à la norme ISO 17025.
Quelles sont les perspectives du BUMIGEB en matière de la recherche géologique et minière au Burkina Faso ?
En termes de perspectives, nous comptons bien sûr mener à terme tous les projets sur lesquels nous travaillons actuellement, condition indéniable pour une diversification de la production minière. A u s s i , n o u s s o u h a i t o n s accompagner davantage les sociétés d’exploration dans la découverte d’autres gisements. C’est pourquoi, nous faisons de l’acquisition d’équipements de pointe et le renforcement de capacités de nos techniciens une priorité afin d’être à la hauteur de leurs attentes.
Vous avez parlé tantôt de contrôle de sécurité dans les industries, les mines et les hydrocarbures. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Il s’agit des contrôles de sécurité effectués sur les équipements à pression utilisés dans les industries, les mines et même les ménages (je veux parler des bouteilles de gaz butane). Nous assurons aussi le contrôle de sécurité des camions citernes et des cuves enterrées dans les stations-services destinées à stocker les produits comme l’essence, le gasoil, le kérosène, … sans oublier les contrôles de qualité effectués sur les produits pétroliers et miniers (lingots, bijoux, …).
Ces contrôles sont-ils effectués dans les mines ?
Oui, ces contrôles sont également effectués dans les mines. Vous savez, les mines fonctionnent elles-mêmes comme des industries. Donc sont détentrices des équipements à pression, des cuves, des bacs. Nous prenons soin d’effectuer ses contrôles de sécurité en leur sein. Aussi, étant le bras technique du ministère chargé des mines, nous accompagnons l’administration centrale lors des missions d’inspection des mines. Puisque nous parlons des mines, nous n’y intervenons pas uniquement pour le contrôle de sécurité. Du reste, nous sommes un acteur majeur de la pesée et du colisage des lingots d’or des mines.
Certaines mines sont dans leur dernière phase d’exploitation, donc doivent passer à celle de la réhabilitation. Pensez-vous déjà à la gestion de cette phase ?
Oui nous anticipons sur cette dernière phase en renforçant les capacités de nos techniciens en la matière afin de réussir cette dernière phase du cycle de vie de la mine.
Selon vous, quels rôles joue ou pourrait jouer le BUMIGEB pour une réhabilitation réussie desdites mines ?
Renforcer les capacités de nos techniciens pour mieux amorcer cette phase de réhabilitation représente pour nous un coût énorme que nous devons supporter malgré l’absence d’un retour immédiat sur investissement. Si nous le faisons, c’est parce que nous sommes conscients du rôle important que nous devons jouer lors de cette phase. Pour revenir à votre question, nous pensons que le BUMIGEB doit être au cœur de la réhabilitation de nos mines mais bien sûr en associant les autres structures comme les mines elles-mêmes, l’Administration en charge des mines, le ministère en charge de l’environnement, l’université à travers son département des sciences de la Terre, …
Cet article a été extrait du magazine Spécial #SAMAO2023
Télécharger l’intégralité du magazine à ce lien : https://samao.org/magazine-samao-2023/?fbclid=IwAR1pfgfKbZMz2QBpOlu3fnnWzgAZE7ZOT4E_FZenV3YFXrn81cMaiRQWNas
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