La journée mondiale de l’environnement est célébrée chaque 05 juin. A l’occasion de cette journée, Mines Actu Burkina s’est entretenu avec Désiré Yaméogo, directeur général de l’Agence nationale des évaluations environnementales (ANEVE). Désiré Yaméogo est revenu sur des manquements dans la protection de l’environnement dans le secteur minier et les sanctions prévues.

Quel est le rôle de l’ANEVE dans la protection de l’environnement dans le secteur minier ?
D’une manière générale, le rôle de l’Agence, c’est de préserver l’environnement à travers les études d’impact environnemental et social. La loi concède que tout acteur qui doit réaliser un projet au Burkina Faso, doit forcément réaliser une étude d’impact environnemental et social. C’est un document qui donne des planifications, clarifie les impacts, identifie les acteurs concernés, définit enfin les mesures d’atténuation. Il est assorti d’un plan de gestion environnementale et sociale. C’est à partir de ce plan de gestion environnementale et sociale qu’est réalisée l’évaluation du projet pour connaitre les mesures mises en œuvre sur le plan de la préservation de l’environnement. Le rôle de l’Agence, c’est d’administrer ces genres d’études réalisées par les promoteurs ou leurs consultants ou bureau d’étude. L’agence à son tour évalue les rapports d’études afin de donner un quitus à travers un arrêté portant sur la faisabilité environnementale ou l’arrêté portant sur la conformité environnementale. Il est signé par le ministre en charge de l’environnement avec un cahier de charge qui permet de suivre l’évolution de la préservation de l’environnement à travers la mise en œuvre des recommandations.
Décrivez-nous le processus de réalisation d’une étude d’impact environnemental et social dans le secteur minier ?
L’étude d’impact environnemental et social commence par le cadrage, ce qui permet de catégoriser le projet qu’il soit national ou international. On distingue trois catégories, à savoir la catégorie A, la catégorie B et la catégorie C. Après la catégorisation, il faut passer à l’élaboration des termes de références qui sont validés d’abord par l’Agence nationale des évaluations environnementales qui donne quitus au consultant ou au bureau d’étude de réaliser l’étude sur le terrain. Dans le secteur minier, c’est une étude complète qui est réalisée. Elle concerne tous les secteurs de l’environnement y compris la faune, le sol, l’air en termes de pollution, les ressources biologiques, notamment l’homme et ses activités. Ce rapport d’étude est examiné et validé par ANEVE. Quand le projet est de la catégorie A, ce n’est pas l’agence seule d’examiner et évaluer le rapport. L’ANEVE met en place un comité d’évaluation qui est composé de plusieurs départements ministériels, des chercheurs et les universitaires. Le consultant présente son rapport et les membres du comité examinent et donnent des observations et des amendements. C’est sur le rapport final que l’arrêté portant sur la conformité environnementale est signé. Mais avant, le rapport faire une contre-expertise et une consultation des parties prenantes. C’est sur la base du rapport de l’enquête publique et le rapport de la session des membres du comité d’évaluation qui permettent au ministre de signer l’arrêté.
Quels sont les manquements récurrents rencontrés dans le secteur minier ?
Le secteur minier est un secteur pollueur par excellence. Un des acteurs les plus pollueurs est l’activité artisanale qui n’est pas souvent réglementée. Dès qu’un filon d’or est découvert, les artisans miniers creusent sans prendre en compte la réhabilitation de l’environnement. Plus de 600 sites ont été dénombrés sur le territoire burkinabè. La semi-mécanique est le deuxième acteur. Il est à cheval entre l’artisanal et les mines industrielles et a moins d’impact par rapport au premier. Le troisième acteur ; ce sont les mines industrielles qui utilisent des appareils performants pour l’exploitation. Elles sont dans un milieu confiné, recrutent des environnementalistes en interne, réalisent des inspections périodiques au cours de l’année. Les mines industrielles sont plus surveillées et encadrées sur le plan environnemental et social.
Les manquements au niveau des sites industriels, c’est généralement l’usage des produits chimiques comme le cyanure et autres, la pollution des eaux de surface et des eaux souterraines et le risque lié à la poussière qui contient souvent des métaux lourds. L’accaparement des terres cultivable, des zones de pâturages et aussi le dédommagement et la compassassions de complaisance des personnes impactées sont aussi des manquements.
Les mines creusent des fosses et des carrières. Les rambler et les refermer causent un véritable problème. La loi permet de réhabiliter les sites miniers mais c’est le volet purement écologique et végétatif, c’est à dire planter des arbres, qui est mis en œuvre. En dehors de cet aspect, les mines abritent des fosses qui sont des trous béants sans réhabilitation.

Quelles sont les sanctions prévues en cas de non-respect de l’environnement dans le secteur minier ?
C’est lors des inspections minières et la vérification des recommandations sur le site selon le cahier de charge que l’on peut sanctionner. Si une mine ne met pas en œuvre les recommandations et amendements, des sanctions sont prévues. Pour ce qui concerne la réhabilitation à l’étape actuelle, aucune mine ne peut dire qu’elle est prête à faire la réhabilitation. C’est vrai qu’elles alimentent des comptes fudiciaires logés au niveau de la banque centrale pour qu’en cas de défaillance, l’Etat prenne en charge la réhabilitation. Mais pour le moment, au niveau de la réhabilitation, il n’y a pas de sanction. Mais lors des inspections sur le terrain, si des failles ou des mesures qu’elles refusent de mettre en œuvre, sont constatées, les sanctions tombent. Elles peuvent être sanctions pécuniaires, des privations de liberté, et même la fermeture de la mine. Ce qui s’est passé à Perkoa, une forme de sanction.
Quelles sont les difficultés rencontrées par I’ANEVE pour couvrir le secteur minier ?
L’ANEVE couvre le territoire national mais n’a pas assez de moyens pour aller partout. Cette difficulté n’est pas propre à l’ANEVE. La plupart des structures de contrôle de l’Etat en suivi environnemental manque d’équipements qui permettent de juger et de donner des résultats sur place. Les prélèvements sont faits et les échantillons envoyés au laboratoire pour analyse.
Avant, on ne pouvait pas aller sur un site minier par surprise sans les averti. Actuellement, nous avons cette possibilité parce que les textes nous permettent.

Avez-vous des recommandations à faire aux acteurs ?
Au niveau de l’Etat, c’est de permettre aux structures de contrôle notamment l’ANEVE, le BUMUGEB, le ministère des mines, et de bien d’autres structures qui font les contrôles d’avoir du matériel et des équipements spécifiques pour le suivi-contrôle. Des voyages d’études dans des pays miniers peuvent permettre de prendre de bons exemples en matière de réhabilitation et de restauration de mine. Un pays comme le Canada, l’Australie, la Russie, l’Afrique du Sud, le Ghana, ont des mines réhabilitées, des modèles de suivi et des équipements spécifiques. L’Etat doit se donner les moyens de permettre à certaines structures d’aller acquérir l’expérience et permettre de booster le volet secteur minier ici au Burkina Faso.
Pour les organisations de la société civile, c’est d’accompagner l’Etat à travers les structures étatiques et dénoncer, proposer des solutions. C’est une manière aussi d’accompagner l’Etat dans la mise en œuvre de ses projets. Aux acteurs du secteur minier, c’est vrai qu’ils participent au développement de notre nation. Ils font des efforts, mais ils peuvent faire davantage d’effort. C’est surtout les inviter à accueillir des étudiants, les futurs apprenants pour qu’ils puissent avoir de l’expérience.
Interview réalisée par Tiba Kassamse OUEDRAOGO
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